Tous les mots sont dans le dictionnaire, il n’y a qu’à puiser pour les mettre bout à bout et en faire des phrases qui, mises les unes au-dessous des autres vont faire un premier paragraphe, puis un autre, etc.
Bientôt les pages se succèdent et constituent un long exposé. Le prétexte, le texte, l’exposé, l’étude, l’essai, l’histoire, le roman prennent forme au fil du temps. Parfois une conférence précède l’ouvrage ; la parole d’abord avant la lecture, l’oreille avant l’œil ; la réduction spatiale, la capture des idées qui descendent vers la main alors que le discours s’envole dans l’air qui vibre selon le volume des mots qui vont sonner plus loin à l’oreille. La manifestation du dire ou de l’écrit ; le travail de l’intangible pour créer des images dans les cerveaux, pas les mêmes pour tous, avec les nuances des diverses perceptions. L’homme se projette ainsi dans l’espace et le temps pour se faire comprendre et se faire prendre ; il jette des ponts entre les êtres, et, la communication devient multiple, s’élargit et forme un cercle.
Filet de mailles de mots pour capturer, se faire entendre ou se faire lire. Donner son esprit, son cœur, ses entrailles en pâture ; se faire dévorer par l’autre pour renaître, se multiplier par les bouches, les mains et les esprits enfermés dans les cerveaux complexes. Recommencer à parler et à écrire chaque jour pour s’exprimer, pour exister dans le concert des humains qui se ressemblent et s’assemblent ; vivre avec la communauté des gens qui s’agitent, agissent ou observent sans paroles ni écrits.
L’Orateur, s’il est doué, captive, séduit, s’approprie l’assemblée et transmet son message. Cet envoi de bouche à oreilles contient des milliers de mots que trient les cerveaux récepteurs. Selon la mémoire des individus des phrases entières sont captées ou quelques mots ; personne n’a pu saisir la conférence en entier, sauf si dans l’assistance se trouve un surdoué de génie. Dans nos sociétés des milliards de mots circulent en tous sens, dans diverses langues, écrits ou parlés. La tour de Babel resurgit, s’érige encore plus haut, comme un immense phare balayant l’Humanité entière de ses rayons fourmillant de langues.
La Communication a dépassée les limites des agoras, des forums et des théâtres antiques ; elle circule dans des fils métalliques, des fibres diverses, des ondes invisibles, dans l’espace où planent les satellites régurgitant les informations reçues des terriens producteurs. Elle déverse en torrents de plus en plus puissants des flots de bruits, de paroles, de musiques, d’images ; de plus en plus vite sur les chevaux de la Lumière.
Dans l’instantanéité de l’information, de la diffusion, de la publication, il se crée une communication globale dans laquelle toutes les sociétés grouillantes d’individus baignent et teignent leur cerveau de toutes ces perceptions sensorielles.