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Le Tangible

By 25 janvier 2021 janvier 27th, 2021 No Comments

Le tangible est ce que l’on touche ; Saint THOMAS disait je ne croirai que ce que je toucherai. Nous sommes confrontés journellement et à tout instant aux objets par le tact et bien sûr conjointement par les autres sens.

Le retour du tangible est cette perception de douceur ou de rugosité et aussi la forme qui nous fait apprécier l’objet touché. Le filtre de nos sens laisse passer vers notre pensée, vers notre esprit, vers nos neurones réceptrices, un faisceau d’informations qui forment le décor dans lequel nous évoluons. C’est notre Monde que l’on crée par l’ouverture de nos sens ; en épiphénomène notre pensée réagit et donne par réflexion une série de constats. Les analyses sont instantanées et nous gardons le souvenir de nos perceptions, si fugaces soient-elles dans notre mémoire et dans la profondeur de notre inconscient.

La forme, le volume, la densité de l’objet sont la préoccupation constante de notre pensée spéculative.

L’Attente et le Rien Faire vident l’Existence de son sens primordial déterminé par l’Action. Nos sens en éveil nous forcent à l’Agir ; nous allons au contact des êtres et des choses pour créer par réflexion notre existence. Nous voulons d’autre part thésauriser nos vécus, leur corpus, en les mettant en mémoire dans la case souvenirs ; quelques détails disparaîtront et seront oubliés ; au fil du temps il n’en restera que l’essentiel que nous pourrons faire resurgir pour illustrer en situation quelques passages de notre passé. Dans la complexité des impressions, des illusions, des aberrations créés par nos sens, notre cerveau est contraint de choisir la situation conjoncturelle où il s’est plu, où il s’est mal senti et aussi celle neutre dépeignant l’historicité des sociétés traversées.  L’humain crée sans cesse du tangible tout en souhaitant le triomphe de l’intangible, cet espace qu’il croit sacré dans sa pensée, mais reste du domaine de l’invisible et parfois du rêve.

Créer est le leitmotiv de l’Humain depuis que sa pensée s’est épanouie. Le visible prend de plus en plus de volume et de vertigineuse hauteur, tandis que la pensée de l’humain s’adapte à ce nouvel environnement. La profusion des objets  nécessite d’énormes dépôts ; les grandes surfaces où le nouvel humain piéton circule comme dans des mini-villes. Il a fallu « surdimensionner », multiplier les trains et les avions pour transporter une humanité grouillante à sept milliards d’individus. Tout finira par se toucher ; les espaces s’amenuisent, les continents sont reliés par quelques heures de voyage. Le tangible est multicolore, multidimensionnel, émergeant du microcosme et ne dépassant pas les limites de notre horizon pour s’évanouir dans le macrocosme. L’objet est roi, manipulable à souhait, il consomme lui-même de l’énergie, engendre des déchets ou constitue un futur déchet car il faudra le remplacer ; le durable est une utopie ! D’ailleurs toutes les civilisations anciennes se sont écroulées dans le Temps historique et ont été remplacées par de nouvelles au fur et à mesure de leur évolution ou de leur destruction. Du passé nous avons plus de ruines que de constructions intactes. L’Homme lui-même a muté ; par rapport à mon grand-père je suis autre et il ne se reconnaîtrait pas en moi. Les valeurs d’antan n’ont plus cours dans le monde dit profane, ainsi l’Honneur n’a plus la même importance et il a perdu son rang primordial pour être relégué à un rang inférieur de la hiérarchie des qualités. Bien d’autres critères de valeur ont perdu leur sens qui conférait au citoyen de notre pays la qualité d’honnête homme. Il est rare de constater un suicide après perte de son honneur ! Dans notre société tout s’explique et des excuses sont trouvées à la tricherie, le mensonge, la démagogie, voire le crime !

Toucher du doigt la réalité des choses est une métaphore communément employée ; c’est rendre tangible le rayon de pensée qui s’applique à la chose. Tangible, l’objet outil, l’objet ludique, l’objet décor ; l’homme semble ce jongleur dans la foule, souvent maladroit et en perte d’équilibre.